vendredi 3 mars 2017

Un jour d'ivers! ...Fin



 La pièce est meublée d’un lit, d’une table, quatre chaises et un buffet.
 Le garçon ne se plaint pas, mais s’il le pouvait, que si ses moyens le permettaient, il irait trouver mieux. Il patiente, dit-il un jour.
 Les autres arrivent, chacun de nous avons apporté de quoi passer une bonne soirée, pour les plats chauds, il suffira de les passer sur les deux feux.
 Pas de gros cadeaux pour ce soir de réveillons, justes des présents qui viennent du cœur, un vinyle de Brassens pour l’un, une bouteille pour un autre, un livre, une BD, c’est fait en fonction des goûts que nous connaissons. Il y a de l’amour, de la chaleur, cela vient du fond de nos âmes.
Il y a aussi ce qui se voit et ce qui ne se voit pas. L’amour caché, pour la fille d’un copain, pour un copain aussi, il faut mettre cela sous le tapis, le garder pour soi, pourtant en y regardant bien, des regards, des attitudes laissent passer l’expression des sentiments.
 Nous avons été jusqu'au bout de la nuit, la lueur du jour se fait, la neige a cessé de tomber.
  Un café bien chaud, et déjà les premiers départs, puis la bande s’éclaircit.
  Rester avec lui pour remettre un peu d’ordre et faire la vaisselle, la ranger.
 Ils parlent aussi, chantent, des sourires s’échangent.
 Éros passe, transpercera-t-il les corps des flèches de son amour ?
 Le temps a passé.

Ils sont mariés chacun de leur côté, ils ont des enfants et petits-enfants. Ils se voient souvent, tantôt chez l’un, tantôt chez l’autre. Ils n’ont pas oublié ce Noël lointain, il se lit souvent dans les regards. C’est leur jardin secret qu’il cultive.

B.cauvin©26/02/3017

Photo prise depuis ma chambre.

jeudi 2 mars 2017

Un jour d'ivers!...5

Caillebotte. Toits sous la neige.

  L’impasse est bien moins lumineuse, plus sombre, si ce n’étaient les petites villas qui donnaient leurs lumières.
 À droite, des palissades de bois, derrière elles, un terrain vague. On devine que des enfants viennent y jouer, quelques planches sont désolidarisées des supports, ils viennent taper dans le ballon, jouer aux cow-boys et aux Indiens, se chamailler aussi, ennuyer les filles qui jouent dans cet espace. Quand cette tempête de neige se terminera, les gosses iront faire des bonshommes de neige et de belles batailles de boules de neige. Les plus grands, le soir, ont des jeux plus secrets… Mais personne n’est dupe.
Au fond, il y a un immeuble de trois étages, une bizarrerie dans la villa. Du côté des petites maisons, une réplique londonienne, l’architecte a dû avoir un vague souvenir, c’est moins réussi et les bâtisses tombent en décrépitudes, pourtant nul ne semble triste ou miséreux, ce n’est pas la richesse non plus. Là ce soir, derrière les fenêtres, les lourds rideaux ne sont pas encore tombés, il y a des sapins de Noël qui sont illuminés, il semble que la fête s’annonce.
 Arriver devant la porte branlante de l’immeuble au fond de l’impasse, la pousser avec ménagements, elle grince. Taper les chaussures les unes contre les autres pour en faire tomber la neige compacte qui se colle entre les crampons. Monter l’escalier vers l’un des studios où a lieu le rendez-vous.
Sur le palier, les toilettes et à côté le point d’eau. Toquer à la porte, l’étonnement et le bonheur, passe sur son visage, l’étonnement, braver ce temps de saison, le bonheur pour l’avoir fait, on est heureux de se retrouver.
 La pièce est au carré, presque, un renfoncement qui sert de cuisine avec un réchaud deux feux, un petit frigo, un comptoir sur lequel on pose une cuvette, elle est utilisée aussi bien pour la toilette que laver la salade…

  Sur les vitres de la fenêtre des cristaux dessinent des arabesques, pourtant il y a un radiateur électrique, il ne réchauffe pas assez la pièce.

B.cauvin@26/02/2017

mercredi 1 mars 2017

Jour d'ivers!... 4



  Dans ce parcours, nous n’y sommes pas encore, pourtant les premiers signes arrivent.  Passer devant ce cinéma de quartier, avec les séances complètes, les actualités filmées, suivit du documentaire ou de dessins animés, l’entracte avec les ouvreuses qui passaient dans les allées avec le panier d’osier accroché autour du cou et qui lançaient, Bonbons, caramels, esquimaux, parfois remplacé par chocolat glacé. Pas de bonne séance de cinéma sans l’esquimau, c’était la madeleine de Proust. Durant l’entracte, il y avait de temps en temps des attractions au profit de La Roue Tourne,  une association qui s’occupait des artistes tombés dans la misère ou en maison de repos, de retraite. Le film clôturait la deuxième partie de la séance.
  Ce soir, les néons de la salle pétillent de couleurs dans le rideau neigeux.
 Marcher, prendre à gauche, s’aventurer dans une impasse au joli nom. La villa des fleurs, ou des mimosas, ou encore des lis, des lilas, peut-être celle des poètes, le souvenir s’estompe, mais pas sa douceur. Peu importe, les pas s’incrustent comme un Arsène Lupin dans la recherche d’une effraction ! Avancer doucement pour ne pas troubler ce monde à part dans la capitale. Les lueurs des maisons font comme des têtes joyeuses, deux yeux, un nez tout brillant, pétillant.
Marquer une pause, rester immobile, finir par ressembler à un bonhomme de neige, écouter un violoniste qui lance ses notes douces, pleureuses, oui pleureuses comme dans une symphonie dont j’ai perdu le nom, je crois que c’était dans le deuxième mouvement. Histoire d’un courrier, d’un amour qui s’éteint, rupture ou mort au champ d’honneur, le violon fait couler les larmes, viendra peu après la reprise des danses, la vie continue. Peut-être est-ce un violoncelle, plus proche de nos sentiments, qu’importe, les notes transportent l’âme.

Écoutez ce musicien, sans doute, le jouera-t-il dans un concert des jours prochain, lui seul le sait, mais les notes s’envolent et tiennent compagnie aux cristaux de neige.

B.cauvin@26/02/2017