vendredi 21 mars 2014

Benoît… (3)


 Je lui donnais ma carte de visite, je demeurais rue des Belles feuilles dans le 16ème arrondissement de Paris, non loin du bois de Boulogne. Benoît lui logeait dans la quinzième rue de Lourmel dans un deux pièces, il me donna en échange la sienne.
 Le soir venu, Benoît me rejoint. J’avais fait quelques achats chez un traiteur de l’avenue Victor Hugo, lui il apporta une bonne bouteille de vin et des gâteaux. J’ignore sa vie, et lui dis qu’il n’avait pas besoin de faire de telle folie. Nous pouvons parler de ce passé commun. « Comment Benoît, son ancêtre, sauva ma famille de l’échafaud, bien que républicain dans l’âme, comment il empêcha la saisie de nos biens, certes, une partie des terres agricoles furent redistribuées aux fermiers, paysans du village. Contre toute attente, des paysans rechignaient à les accepter, il fallut presque que le comité républicain les y força, pour d’autres ce ne fut pas le cas, un arrière goût de vengeance envers les possédants, cette haine aussi frappa de la part de ses gens ma famille. Pourtant nous ne les maltraitions pas, au contraire, notre famille tenait à ce qu’ils ne manquent de rien. Ces moments troubles ne font pas de discernements, du moins pour une partie des deux cotés de la barrière. Si le château fut préservé du pillage, ce n’est pas le cas de la résidence dans la ville qui reçut les assauts des plus agités de Villeneuve le roi. Benoît Chaudeur, élu délégué du peuple de la ville auprès du Tiers Etat s’interposa, des dégâts mais pas de pillage. Je remerciais (comme sans doute bon nombre de mes anciens l’on fait bien avant moi), Benoît envers la famille Chaudeur pour ce dévouement. Mon ancêtre de Pompiac, trop vieux pour supporter un  tel voyage resta au château dans le désordre qui régnait lors de la grande révolution. Benoît fourni des sauf-conduits pour les membres de la famille, division en plusieurs branches, passage par l’Espagne, se réfugiant dans les iles Canaries, d’autres passèrent par la Suisse, remontant par l’Allemagne, la Hollande, gagnant l’Angleterre. Hubert avait rejoint cette dernière, une autre partie resta en Suisse. Ce n’est qu’après la chute de l’empereur que la famille des Pompiac revint en France. Hubert dans son cercueil.
   Ils étaient là à parler de cette époque bien lointaine.
­– Benoît, si tu le veux, le peux, ce week-end nous irons au château, il y a des archives, nous pourrions les consulter et remonter le temps, vivre les péripéties de nos familles, elles y sont consignées. Et qui sait si nous n’en écrirons pas une de plus.
– Volontiers Hubert, de revivre un passé si exaltant. Je tacherais de venir avec quelques brides des miennes, car sur un grimoire, mes aïeux on conté cette vie depuis le grand tour jusqu’à la résistance.

  Ainsi nous allions remonter le temps, revivre leurs aventures, une certaine exaltation nous habitait, c’était étrange quand même que plus de deux siècles en vie parallèle nous amène à nous retrouver, le destin a ses mystères,  ils sont plus impénétrables que ceux des Dieux.

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