mercredi 26 mars 2014

Benoit…(8)


Monsieur de Pompiac servit un alcool blanc pour ceux qui en veulent et pour la gente féminine préférant une Marie-Brizard. Le passé de nos familles était loin, l’actualité l’ayant remplacé, celle de la France, de l’Europe, du monde. Les avis étaient très ouverts, divergeant, surtout entre mon frère et moi, mon aîné était plus proche de celles de notre père, j’étais dans un univers plus ouvert, éloigné du leur, de ce qu’ils représentent.
– Ah !, la Capitale, l’université, l’éducation nationale embrouille bien l’esprit de nos enfants, dit mon père.
   Une heure de bavardages aussi intéressants que stérile, une sorte de café du commerce dans des murs dorés, interrompu, mis en sourdine par un concert de Brahms effectué par l’orchestre national de Budapest, Benoît qui semble beaucoup l’apprécier l’écoutait religieusement, son âme était partie là bas. Arrive l’heure de rejoindre les chambres, au moment de nous séparer, Benoît et moi échangeons une salutation avant de pousser la porte de nos chambres qui abriterons nos rêves les plus fous. J’ai eu du mal à m’endormir, mes pensées vagabondaient vers l’autre côté de la paroi qui séparait nos pièces, elles étaient vers Benoît, j’aurais aimé partager sa couche. Au matin du dimanche je me levais et ne m’attendais pas à une volée de bois vert par mon aîné, il avait remarqué la façon dont Benoît et moi nous nous quittions avant le coucher, pourtant rien de très explicite, une accolade qu’il jugea inappropriée, il disait qu’elle était équivoque, pourtant rien de sexuel dans ce geste, juste une marque d’amitié. C’est vrai que nos lèvres étaient à deux doigts de se rencontrer, combien de fois cela arrivait entre nous, entre père et nous, ce n’est qu’un mouvement de tête, rien qui puisse permettre une telle attaque, et combien même cela serait, c’est mon problème, ma vie, pas la sienne. En nous quittant pour le rez-de-chaussée il me lança – « Qu’il n’aimait pas voir de Pédé dans la famille » ce à quoi je lui répondit – « Que je n’étais pas le premier dans la lignée, que dans toutes les fratries qui nous précédées ils y en eu, et que certain furent même décapités, privilège de la noblesse, sinon pour les autres c’est la corde et le bûcher ». Non mon frère tu n’as pas le droit de me juger, de te mêler de ma vie. Et si nos âmes flirtent, on ne peut encore présager de l’avenir. Heureusement que l’accroche avec mon frère ne gâchât pas la suite du dimanche. Le matin nous allons à l’église, il est onze heures, une cérémonie toujours prisée par la famille, je suis plutôt réservé sur la conception de cette foi, je dirais même de toutes les pratiques religieuses, chaque jours qui passent m’en éloignent, Benoît, par sympathie, politesse nous y accompagne, j’ai compris que lui est plutôt athée, il fait un effort considérable, j’apprécie sa valeur. 
A suivre…

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